Les Bandhas

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Les verrous énergétiques

Bienfaits, Mise en pratique et contre-indications

Ce texte est très long oui mais sachez qu’il est le fruit d’un travail de recherche approfondi sur le sujet et que si les Bandhas vous intéressent, vous trouverez à coup sûr votre bonheur ici !

Le côté énergétique, l’imaginaire humain associé à la physiologie ainsi que mon attrait pour l’anthropologie ont fait que les Bandhas m’ont toujours beaucoup intrigués. Depuis mes formations initiales de professeur de yoga obtenues en 2017, 2018 et 2019, je n’ai eu que des informations parcellaires à ce sujet et j’avoue que la question continuait de me trotter dans la tête. Je n’avais jusque là pas pris le temps d’aller plus loin. C’est maintenant chose faite.

Les bandhas s’inscrivent, dit-on, dans une tradition millénaire venant du yoga tantrique. Ils sont issus de textes anciens nommés les vedas. Pratiqués aujourd’hui dans nos cours de yoga hebdomadaire, les bandhas sont autant une interprétation moderne physiologique, ésotérique ou le fruit de notre imaginaire qu’une pratique traditionnelle et authentique. Je ne prendrais pas de ton savant et dogmatique pour en parler:) car je suis bien loin d’avoir exploré à fond cet aspect du yoga, j’ai cependant trouvé intéressant de partager avec vous le fruit de mes recherches actuelles sur le sujet.

Je vous parlerais donc de textes traditionnels et des connaissances scientifiques actuelles. Cela nous aidera à développer notre compréhension la plus complète possible de ce que sont ces « verrous énergétiques ». Dans cette vidéo, je vous présente ainsi ce que sont les bandhas, leur significations, leurs bienfaits, des techniques pour les pratiquer et leurs contre-indications. Ma compréhension des bandhas est inspirée de mes lectures de : Pranayama, d’André Van Lysbeth, Gheranda Samhita et de Shiva Samhita, deux textes classiques du Hatha yoga datant du 17ième siècle. De ma formation en Yoga sans dégâts et Yoga pré et post natal selon B. de Gasquet. Et de mes échanges riches avec Catherine Bellières et Serge Gastineau.

Les bandhas ont pour vocation de canaliser et de bloquer, puis d’éveiller et de consolider ce que l’on considère en yoga comme « la force cosmique divine en nous », la kundalini. Cette énergie vitale est symbolisée par un serpent et est semblable à un pouvoir hydro-électrique circulant dans notre corps. Une fois relâchés, les bandhas permettent ensuite la libre circulation de l’énergie par le canal énergétique central situé le long de notre colonne vertébrale, canal nommé sushuma.

A travers, ce travail de visualisation et d’imagination de notre géographie intérieure, les bandhas ont un effet positif en stimulant notre psychisme et notre spiritualité.

D’un point de vue physiologique, les contractions musculaires des bandhas permettent de tonifier, masser, renforcer et purifier notre corps et nos organes internes (reproducteurs et digestifs notamment). Aussi de stimuler notre système endocrinien, nos centres nerveux et donc de réguler nos émotions et humeurs. De diminuer également notre pression sanguine (après contraction et décontraction du périnée, des grands droits et de la gorge, notre sang frais est augmenté et l’évacuation des cellules usagées s’effectue). Ralentir le rythme cardiaque et calmer la respiration. Ces contractions sont des soutiens de la zone lombaire et vertébrale utiles aux postures de yoga. La respiration avec verrous, avec bandhas, aide à fournir moins d’effort, à gagner en énergie et à mieux engager les muscles.

Contre indication générale à la réalisation des bandhas : hypertension, maladies cardiaques ou hyperthyroïdie.

Bandha signifie nouer, tenir, contracter, joindre, bloquer, contrôler. Verrouillage, ligature énergétique.

1/ Mula Bandha ou Moola Bandha (Muladhara Chakra/racine)

 

Vous voulez pratiquer avec moi ? Rendez-vous sur ma chaîne YouTube. Je vous explique en vidéo ce qu’est Mula Bandha et comment le pratiquer. 

« Le Yogi doit d’abord fermer les sphincters de l’anus avec la pression du talon, puis tirer puissamment vers le haut apânavâyu, enfin le faire monter doucement. Ceci est mûlabandhamudrâ qui détruit vieillesse et mort.
Si, en faisant ce bandha, on arrive à unir prâna et apâna (ndlr : souffle nourrissant allant vers l’intérieur et souffle d’élimination allant vers l’extérieur), on accomplit également yonimudrâ.

Si l’on fait yonimudrâ qu’y a-t-il que l’on ne puisse accomplir dans le monde? Grâce à ce bandha le Yogi vainc la paresse et, assis en padmâsana, il quitte la terre pour se mouvoir dans l’espace.

Si le grand Yogi veut traverser le fleuve du Samsâra (ndlr : courant des renaissances successives) qu’il accomplisse ce bandha dans un lieu isolé et secret.
Traditionnellement mûlabandha est prescrit en permanence non seulement dans toutes les pratiques mais aussi à chaque instant de la vie profane. » Traduction de C. Tikhomiroff

Mula signifie racine. Adhara : signifie soutien, support.

Bienfaits spécifiques : Le « verrou racine » améliore le fonctionnement du système génital (lympathique, sanguin) et soulage les hémorroïdes.

Technique : Contraction du plancher pelvien, de l’anus aux testicules pour les hommes, de l’anus aux col de l’utérus pour les femmes sous l’effet d’une respiration avec bassin anteversé. Iyengar à ce sujet précise que l’engagement spontané s’effectue jusqu’au nombril, muscles transverses compris donc. Ainsi lorsque le périnée s’engage, les muscles transverses le sont également, par synergie et en antagonisme avec le diaphragme. « Le périnée expir’ » de Bernadette de Gasquet, c’est cela, une forme d’entretien intuitif du périnée et des transverses, sans raccourcissement de la zone nombril-pubis. C’est un exercice d’élasticité du périnée et des transverses. MB est plus facile à sentir après une inspiration sur la rétention poumon plein. En effet, naturellement le périnée répond à la pression vers le bas du diaphragme lors de l’inspiration.

Pour approcher MB, on ne contracte pas le périnée, on le laisse se contracter tout seul du fait de la respiration physiologique et du bon postural. On ne respire pas, ça respire tout seul. Si l’on contracte, il y a une poussée vers le périnée et cela l’abîme et le fibrose. Lorsque M.B. est engagé cela donne spontanément envie d’enrouler le dos. B. de Gasquet considère cela comme une contre-nutation (engagement ligamentaires de la zone sacro-iliaque). Cath Bellières et Serge Gastineau, parlent à ce propos d’un engagement du périnée-transverse sans contre-nutation.

Dans les textes classiques, MB est prescrit en permanence alors que B. de Gasquet, Catherine Bellières et Serge Gastineau invitent à ne maintenir engagé le périnée que sur une courte durée. Le contracter qui plus est sur une durée importante est impropre à son usage et délétère même.

Périnée = un trampoline qui reçoit les changements de pressions dans l’abdomen, dus à la respiration, rire, parler, tousser. Bassin = hamac suspendu aux fémurs.

Exercice : Mise en pratique de MB avec respiration spontanée sangle abdominale contrôlée et avec Kapalabathi et activation du périnée-expiration + transverses mais grands droits relâchés.

Contre-indication : Mula bandha se fait donc spontanément dans un premier temps. Ne pas le garder engagé trop longtemps sous peine de voir le périnée se fibroser. Si on serre les fesses en même temps, cela s’appelle le mudra de la jument. Tenu trop longtemps cela peut être délétère.

2/Jalandhara Bandha(Vishuddhi chakra/chakra de la gorge)

Vous voulez pratiquer avec moi ? Rendez-vous sur ma chaîne YouTube. Je vous explique en vidéo ce qu’est Jalandhara Bandha et comment le pratiquer. 

« Le Yogi doit contracter la gorge afin de fermer l’ensemble des nâdî en appuyant le menton sur la poitrine. Ceci se nomme jâlandharamudrâ que même certains dieux ont du mal à exécuter. Le feu du ventre consume, chez les êtres vivants, tout le nectar qui coule du lotus aux mille pétales. C’est pourquoi il faut pratiquer ce bandha.
Cette pratique arrête l’écoulement d’Amrita ce qui permet au Yogi d’économiser ce précieux élixir de vie. Suivant les techniques Jâlandharabandha est maintenu en permanence, particulièrement dans certains prânâyâma et concentrations. On peut le réaliser très fermement en appuyant fortement le menton sur la poitrine sortie ou bien plus subtilement en réalisant ce que l’on appelle le crochet qui consiste surtout à baisser légèrement le menton et à faire une contraction intérieure de la gorge très hermétique. »Shiva Samhita, chapitre IV

Jala signifie en sanskrit réseau, eau. Dhara courant, mouvement vers le haut.

Jalandhara Bandha, Bandha principal, accompagne toute rétention prolongée et peut se réaliser à n’importe quelle étape respiratoire.

Technique : Commencer par aspirer la salive puis garder la contraction de la gorge, menton placé vers la fourchette du sternum, vers le manubrium (sans abaisser ce même manubrium). Effectuer un serrage de la gorge et laisser la langue collée au palais. Une fois terminé Jalandhara Bandha relâcher la glotte.

→ JB permet au souffle d’être maintenu dans le thorax. C’est une obligation formelle pour éviter toute pression délétère dans les zones supérieures du corps. (ORL, tête)

Bienfaits :
→ JB effectue une compression de la carotide et de ses corollaires, induit un ralentissement de la circulation artérielle, et donc des battement du cœur. Cela ré-équilibre le fait qu’une rétention prolongée du souffle produit à l’inverse une augmentation de la circulation et du rythme cardiaque. Jalhandara bandha permet donc de protéger le cœur.
→ Ce verrou énergétique crée un état de transe hypnotique lié à la stimulation du nerf vague.
→Il étire nuque, cervicales, dorsaux et tous les centres nerveux rachidiens. Dégage ainsi les nerfs rachidiens en agissant sur les centres respiratoires et cardiaques. Cela crée une vaso-motricité de certains métabolismes essentiels du corps. Peut aider à réguler migraines, vertiges, maux de gorge et des oreilles.

Halasana/charrue et sarvangasana/chandelle avec couverture sous les dorsaux sont des postures qui préparent à ce bandha.
Aussi, pour sentir le léger engagement de Jalandhara, avaler sa salive, ça permet de sentir la zone exacte à ouvrir ou serrer.

3/Uddiyana Bandha (manipura chakra/plexus solaire)

Vous voulez pratiquer avec moi ? Rendez-vous sur ma chaîne YouTube. Je vous explique en vidéo ce qu’est Uddiyana Bandha et comment le pratiquer. 

« Rétracter le ventre vers l’arrière et tirer vers le haut la partie située au-dessus du nombril. C’est grâce à cette contraction que les “grands oiseaux” (les souffles vitaux) prennent sans cesse leur envol. Uddiyana bandha est comme un lion qui dompte l’éléphant de la mort. De toutes les contractions Uddyiana est la meilleure, sa pratique régulière mène à la libération qui devient alors l’état naturel. » Gheranda Samhita
traduction : Jean Papin, le yoga du corps

Uddiyana signifie s’envoler, se lever ou prendre son essor.

Ce bandha constitue un massage de la paroi abdominale (peut donc aider pour les maux d’estomac, la constipation, à décongestionner la zone, réduire les gaz et acidités,…) et à muscler le bas du dos. Il restaure la mobilité diaphragmatique, renforce le métabolisme par le biais de sa stimulation du plexus solaire, aide donc à gérer le stress, stimule le feu digestif, expulse l’air résiduel du bas des poumons, travail à l’élasticité du tissu pulmonaire et des cartilages intercostaux et renforce la sangle abdominale. Selon l’Ayurveda, ce bandha contribue à dissiper les émotions de colère, de frustrations et d’irritabilités liées à Pitta dosha.
Technique : Ce bandha active les mêmes réflexes que lorsque l’on vomit. Démarrer la sangle abdominale relaxée et passive, dos légèrement arrondi, effectuer une brève inspiration, puis une expiration longue (par la bouche si besoin en fin d’expiration, pour vider les poumons, comme si l’on voulait faire de la buée sur une vitre) fléchir au niveau des chevilles, genoux et hanches, puis mains sur le haut des cuisses, pouce en dedans ou dehors, bras tendus, épaules basses, laisser le diaphragme remonter spontanément vers la poitrine et le nombril se diriger vers la colonne vertébrale sous l’effet de la fausse inspiration thoracique. Cela crée un vacuum au niveau de l’estomac par un jeu de pression, dépression entre abdomen et poumon. Ce bandha se pratique estomac, vessie et intestin vide. (Si tel n’est pas le cas ou si l’on est fatigué, enceinte, en menstruation,… il est tout de même possible de le réaliser mais avec une très légère intensité.) Dans sa version classique et physiologiquement conseillée : à poumon vide (bahya Kumbhaka). Terminer ce bandha et cette rétention d’air poumon vide, en laissant la glotte se relâcher, le voile du palais se ré-ouvrir, l’abdomen revenir à une position neutre, puis si besoin expirer un petit filet d’air avant d’inspirer de nouveau. Cela afin d’éviter que se crée une dépression d’air, sous forme d’appel d’air violent, pour permettre de préserver les alvéoles et muqueuses pulmonaires. Ce bandha correspond à ce que l’on nomme Fausse Inspiration thoracique.

Si l’on tousse à la fin UB, c’est que la gorge est irritée et que l’exercice n’a pas été effectué tout à fait correctement. Cela peut être lié à notre dos pas assez rond, à nos genoux pas assez pliés, au fait que l’on remonte l’abdomen vers les poumons alors qu’il est plutôt question de diriger le tout vers l’arrière, les reins. Si tel est le cas, on peut le refaire allongé (selon apport de B. de Gasquet : dos au sol, genoux pliés largeur du bassin, hanche fléchie, avec légère antéversion ou 4 pattes comme suggéré par Cath Bellières et Serge Gastineau).

Nauli Kriya/ le baratage : Cet exercice de purification est un travail de changement de pression au niveau thoracique et abdomen. Au lieu de gonfler, dégonfler l’abdomen, ce qui est délétère pour le périnée, on effectue une Fausse Inspiration thoracique, puis on relâche, de nouveau F.I.T., puis on relâche, pression au niveau thoracique puis vers l’abdomen ainsi de suite.

Contre-indications :
– Ulcères
– Hernies
– Pression artérielle trop élevée
– Maladies cardiaques
– Glaucome
– Règles (Sauf pour pratiquante connaissant bien son corps, dit-on dans le monde du yoga traditionnel !? Personnellement, ma pratique est surtout liée à mon état de fatigue plutôt qu’à mon cycle menstruel. A vous de voir en essayer de pratiquer au maximum « en conscience » comme on dit dans le milieu).
– Grossesse. Alors que dans la tradition du yoga, on aurait plutôt tendance à circonscrire l’usage d’Uddiyana bandha à des moments de vie hors grossesse, Bernadette de Gasquet indique que la Fausse Inspiration thoracique peut se pratiquer en pré-natal (Dans le cas où il y a trop de poids, pour soulager notamment les lombaires et le périnée, de la constipation, pour faciliter la digestion, …) et en post natal dès la table d’accouchement (pour les mêmes raisons qu’en pré-natal et même après une césarienne, pour drainer la cicatrice).

4/ Maha Bandha ou Traya Bandha

« Le grand verrou » ou la combinaison des trois verrous précédents peut être pratiqué lors des exercices de respiration, en particulier lors des rétentions (Kumbhaka) poumon vide ou plein ou lors de la préparation à la méditation. Compte tenu des effets physiologiques nombreux et intense qu’il génère, ce grand verrou ne devrait pas être pratiqué par les débutants. Si l’on souhaite tout de même essayer par soi-même, pratiquer avec une intensité modérée (contraction douce) est bien sûr préférable.

De manière générale, lorsqu’on effectue les 3 bandhas, il est conseillé « traditionnellement » et physiologiquement de commencer par verrouiller la gorge et inversement pour terminer de déverrouiller au niveau de la gorge.

Lors de la pratique, garder en tête de toujours écouter ses ressentis. Un inconfort ressenti, relâcher doucement le bandha, se relaxer et reprendre plus tard. En cas d’hypertension, maladies cardiaques ou hyperthyroïdie, ne pas effectuer les bandhas ou avec une contraction extrêmement modérée afin de maîtriser l’exercice et de ne pas trop amplifier ses effets.

Pour aller plus loin et pour la mise en pratique de ces 4 verrous énergétiques, rendez-vous sur ma chaîne YouTube !